« Surfer en travaillant » Tribune libre pour Le d’Oc, par Maître Alexandra SOULIER, avocat au Barreau de Montpellier
Publié le :
01/03/2017
01
mars
mars
03
2017
« Les petitesses de la vie privée peuvent s'allier avec l'héroïsme de la vie publique » estimait Voltaire[1]. Aujourd’hui, la vie privée du salarié, quelle qu’elle soit, est protégée, faisant encore écho à cette maxime, que l'on pourrait résumer ainsi : "la réussite professionnelle peut s’allier avec la vie privée, même critiquable". Certes, mais jusqu’à quel point ?
Qui n'a jamais traîné sur les réseaux sociaux, mis à jour son statut Facebook, partagé le tweet qui tue ou posté sa photo de soirée sur Instagram, entre deux mails, pendant son temps de travail ?
Que l’on soit employeur ou salarié, homme, femme, français ou étranger, chacun a droit à sa vie privée[2], qui s’entend dans ses choix de vie, ses mœurs, le secret de ses correspondances [3], même électroniques.
Mais jusqu’où cette vie privée s'étend-t-elle, où trouve-t-elle ses limites, notamment lorsqu’elle se heurte au confluent professionnel ?
On pense à ce salarié qui passe le plus clair de son temps de travail sur les réseaux sociaux, ou, plus inconscient, à celui qui surfe sur des sites pornographiques pendant son temps de travail.
Comment l’employeur peut-il agir ? De quels outils dispose-t-il pour lutter contre l’utilisation massive, abusive ou illégitime du net par son salarié ?
Les textes ne répondent pas directement à la question. Le seul principe étant : « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché »
[4].
Au visa de ce texte, un salarié peut être licencié pour faute grave en cas de connexions frénétiques sur Internet pendant son temps de travail[5]. A cet égard, il faut savoir que les connexions internet du salarié pendant ses heures de travail, grâce à l’outil informatique mis à disposition par son employeur, sont présumées avoir un caractère professionnel[6]. A savoir aussi : inscrire un site dans sa liste de « favoris » ne confère pas un caractère personnel à ce site [7].
Dans le même registre, rappelons aussi que les dossiers créés par un salarié sur l’ordinateur mis à sa disposition par l’employeur sont présumés, sauf s’ils sont identifiés comme personnels, avoir un caractère professionnel, et l’employeur peut y avoir accès hors de sa présence[8]. Attention : le fichier portant le nom du salarié ne suffit pas à le qualifier de « personnel ».
Mais la découverte dans les règles de l’art de fichiers pornographiques sur un fichier professionnel du salarié est insuffisante à caractériser la faute grave[9]. Dans ce cas de figure, le salarié avait judicieusement soutenu que les fichiers litigieux avaient été stockés à son insu… Le doute lui profitant, la preuve de la faute grave n’avait, selon les juges, pas été établie.
Afin de pallier les difficultés de preuve, et d’éviter de trop longs errements sur sites non autorisés, il est donc conseillé aux employeurs de réglementer l’usage des outils de communication de l’entreprise, au sein du règlement intérieur ou dans le cadre d’une charte informatique [10]. S’agissant des « keyloggers », dispositifs permettant d’enregistrer les actions effectuées par un salarié sur son poste informatique, sachez qu’ils sont fortement encadrés[11].
Et, pour les salariés, n’oubliez pas que vous avez droit de disposer de votre vie privée, protégée… Surfer en travaillant ? Oui, mais modérément…
[1] François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE, Moeurs, 175)
[2] L’article 9 du Code civil rappelle le principe fondamental du respect du à la vie privée
[3] réprimé pénalement
[4] art. L.1121-1 du Code du travail
[5] Cass. soc., 26 fév. 2013, n°11-27372
[6] Cass. Soc., 9 juill. 2008, n°06-45800
[7] Cass. Soc., 9 fév. 2010, n°08-45253
[8] Cass. Soc., 21 oct. 2009, n°07-43877
[9] Cass. Soc., 14 avr. 2010, n°08-43258
[10] Cass. Soc., 8 oct. 2014, n°13-14991
[11] Communiqué de la CNIL du 20 mars 2013
Maître Alexandra SOULIER,
Avocat - Cabinet ARMANDET - LE TARGAT - GELER
Pour le magazine d’Oc - Février 2017
Historique
-
Crime à Palavas : la justice face à la maladie mentale - Affaire du cabinet - Maître Armandet
Publié le : 26/10/2018 26 octobre oct. 10 2018Informations généralesSource : www.midilibre.fr
-
Me Yann Le Targat membre de l'équipe pédagogique du Centre de Droit de la Consommation et du Marché à Montpellier
Publié le : 09/05/2017 09 mai mai 05 2017Informations généralesSource : cdcm-montpellier.com
-
« Surfer en travaillant » Tribune libre pour Le d’Oc, par Maître Alexandra SOULIER, avocat au Barreau de Montpellier
Publié le : 01/03/2017 01 mars mars 03 2017Informations générales« Les petitesses de la vie privée peuvent s'allier avec l'héroïsme de la vie...
-
Agression sexuelle : parole contre parole - Interview de Me Yann Le Targat - Midi Libre - Montpellier - Vendredi 28 Octobre 2016
Publié le : 31/10/2016 31 octobre oct. 10 2016Informations généralesL'employée avait mis en cause le directeur d'une piscine "Il est temps que...Source : www.midilibre.fr
-
Le délai de prescription des #honoraires d'avocat #avocat
Publié le : 08/04/2015 08 avril avr. 04 2015Informations généralesDeux arrêts récents rendus par la Cour de cassation précisent qu’un avocat ne...Source : www.dossierfamilial.com